vendredi 28 septembre 2018

Arromanches Blues


C'est un gnon puissant coup
Railleur puissante brise soufflant
Par cette ch'mise sous le vent
D'eaux combattues qui fouettent
De crachats le pont
(...)

Jack Kerouac, Mexico City Blues, 42ème chorus

(9)


dimanche 16 septembre 2018

CdC 17






Lundi 8 mai, le jour d'après,

Malgré l'adversaire idéal, élu avec seulement 40% des inscrits sur les listes électorales. Battue avec 3 millions de voix de plus qu'au premier tour, malgré le débat et son propre sabordage. 10 millions de voix!! Désespérant, étourdissant. Je me retire de la vie politique.
Macron terrifiant d'amateurisme lors de sa première intervention, les yeux fixés sur son prompteur. Il débite son discours "empreint de gravité, lucide, responsable". Même le réalisateur semble ne pas en croire ses caméras. Pendant quelques minutes, Macron est filmé de biais, montrant insolemment qu'il lit. Il ne regarde pas la caméra il ne regarde pas les français, lui, "le Président de tous les français". Et le plan dure... Impression désastreuse. Un Président, seul dans une pièce, "à l'abri" de la population.
La Joconde, Dürer et François Ier n'en peuvent plus de rire. Ils s'étouffent. Du burlesque. Du sous-Mitterrand au Panthéon. Les projecteurs en pleine figure, il a l'air hagard, faisant l'effort de ne pas cligner des yeux. Il ne sait pas où regarder. Bouger la tête? Il n'y pense pas. Accélérer cette pitrerie?  Ça risque de se voir. Et que le chemin est long dans cette cour du Louvre. Ça n'en finit pas. En campagne, il ressemblait à un jeune entrepreneur de start-up dynamique. Maintenant, c'est "Dans la peau de Giscard et Mitterrand réunis". Pathétique. J'ai eu envie de le voir courir, sur la fin, pour abréger nos souffrances. Alors, je l'aurais peut-être trouvé sympathique. Peut-être.
A 20h, il faisait son âge. Trois heures plus tard, il en fait 70. Et re-discours. Quand il a dit "Je vous servirai avec amour", je suis resté pantois. Je ne m'étais pas rendu compte que nous étions passés à une rediffusion des Feux de l'amour.

CdC 16









Dimanche 7 mai, Jour J,

Il fait beau. On se déplace en famille, à pied. Ce n'est pas loin mais aujourd'hui je trouve ça trop long. Le gymnase me semble immense, froid, repoussant. Je n'y avais jamais prêté attention. Un seul bulletin. Les poubelles jaunes de l'isoloir tranchent avec le vert du sol du gymnase. Peu de papiers dans la poubelle. Le bulletin, l'enveloppe. Pas de déchets à mon empreinte, éviter d'être soluble dans le néant, dans le refus d'envisager un choix.
Une vague hésitation. Mettre le bulletin dans l'enveloppe. Ou pas. Je mets ce foutu bulletin dans l'enveloppe et je sors de là le plus vite possible.
Identité. Mon nom résonne dans le gymnase.Mon bulletin glisse furtivement dans l'urne, cri silencieux, contraint. "A voté". Tout reprendre, s'en aller, dire au revoir (penser adieu) et ne pas se retourner. Fini pour moi. En réserve. Le choix d'être spectateur, la posture de l'étranger.
Je suis en colère, j'ai voté en colère mais j'éprouve maintenant du soulagement (lâche?). Je reprends la liberté que je me suis confisqué à l'instant. Dehors, panneau drapeau poubelle. Sans distance, dans un lot. Y mettre la carte d'électeur? Bah!, à quoi bon. Geste superflu. Une relique. Comme un regret? Partir. Revenir?

jeudi 13 septembre 2018

CdC 15


Jeudi 4 mai, J-3,

"La 5ème République m'a tuer". Et c'est la deuxième fois qu'elle me fait le coup.Je ne suis plus un électeur mais une machine docile qui se plie à la bien-pensance. Par défaut. Parce que mon éducation m'a appris à rejeter le mal même si ce n'est pas pour faire triompher le bien. Je sombre dans la neurasthénie électorale. Trouver de la cohérence dans la contrainte? Trouver de l’incohérence dans le libre choix? Sortir du corps électoral pour entrer en soi. Réflexions morbides d'un électeur solitaire. J'arrive au bout du chemin de la période de transition. Ces dernières années, j'ai passé mon temps à "voter blanc", je vais devenir abstentionniste intégral dimanche, en assumant une dernière vexation. Et si un jour, le vote blanc est enfin reconnu comme un vote exprimé, eh bien... .

CdC 14







Mardi 2 mai, J-5,

Il y a 15 ans, Le Pen père nous faisait le coup du grand-père gâteau, au sourire aérien et au col roulé si photogénique, sur son affiche du 2ème tour. La fille pose assise sur un bord de bureau, tailleur noir, veste bleue, bout de cuisse et genou droit visibles. Érotisation de la candidate, en posture d'executive woman au sourire si humain, presque cajoleur. Un slogan à l'avenant : choisir la France. Un plan drague, voire un plan cul avec cette partie du corps dénudée. Une Marianne bienveillante mais aussi attirante. Choisir la femme. Derrière, une bibliothèque informe que la candidate sait lire.

lundi 10 septembre 2018

CdC 13


Dimanche 23 avril J-14,

Macron ne fait même pas semblant de croire qu'il y a un deuxième tour à gagner. Son intervention est celle d'un vainqueur final, pas d'un qualifié. Son discours est creux, emphatique, trop long. Pas à la hauteur de la situation. Tout ceci est pathétique, presque indécent.

Mardi 25 avril, J-12,

Un peu partout dans la presse, Macron se fait tancer pour l’insignifiance et la médiocrité de son discours. Un humoriste a dit : "Il se tripote comme s'il venait d'avoir le bac." Le doute surgit de partout, mais un doute entre les lignes, pas franc. Au cas où... .

Jeudi 27 avril, J-10,

Celui qui a déjà gagné n'a  plus l'air de savoir pourquoi il est là. Devenir Président de la République. Il semble pris d'un vertige à l'approche du sommet. Dimanche soir, il a gagné comme dans un jeu. Maintenant, cela paraît bien lourd à porter. Hier, l'hystérie du type qui ne contrôle rien, qui en fait trop (Cf CdC 11). Aujourd'hui, remise à plat, gestion minimum. Navigation à vue. Ça inquiète. Le doute prolifère. Il semble si fragile, soudain, balloté par le hasard et les circonstances. Robinson Crusoé d'une élection désormais imperdable.

Vendredi 28 avril, J-9,

Visite à Oradour sur Glane. Visage de circonstance, gravité, discrétion malhabile face au poids de l'Histoire. Rien n'y fait. Il paraît si pataud, presque enfant dans ce costume trop grand. Quelques mots insipides.

Samedi 29 avril, J-8,

L'affiche du 2ème tour. En gestionnaire radical-socialiste. Plein cadre, cravaté. Un notaire de la 3ème République. Il vieillit à vue d’œil.

Lundi 1er mai, J-6,

En meeting, c'est un rewind (comme disait Philippe Léotard). Raideur, visage inexpressif, gestuelle du corps et de la main droite. L'impression d'un copier-coller. Sarkozy est de retour et personne n'en sait rien!! Macron 2007


CdC 12






Jeudi 27 avril, J-10,

Le Pen tente tout ce qui est possible, y compris le plus grotesque. Son programme n'existe plus, elle tape sur l'autre, ressort les ferments de l'anti-France. Macron est décrit comme un ennemi du pays, un être fourbe, attaché aux puissances de l'argent.

Vendredi 28 avril, J-9,

L'anti-France était trop marquée hier? Elle balance le gouvernail de l'autre côté. Intervention filmée à l'intention des électeurs de JL Mélenchon. Elle fait le coup de l'oubli des rancœurs, le rejet de Macron, le patriotisme bon teint. Tellement bien fait que c'est encore plus terrifiant. Un caméléon redoutable pour les pensées volatiles.

Dimanche 30 avril, J-7,

A la télévision, le ton susurré, complice, proche de l'intimité, l'histoire du soir aux enfants. Le ton doucereux ne parvient pas vraiment à chasser le gout moisi de la sémantique.

Lundi 1er mai, J-6,

Le Pen a retrouvé la boîte à calembours de papa."Avec, Macron c'est En Marche ou crève". Décidément, la campagne électorale que nous vivons n'est pas un rêve.


vendredi 7 septembre 2018

CdC 11






Mercredi 26 avril, J-11,

Macron a fait un discours hystérique contre Le Pen. Il criait, montait dans les aigus, répétant trois fois: "Pas ça!, pas ça!, pas ça!". Dimanche soir, à 20h30, on aurait presque pu y croire. Mais là, trois jours après. Cette indignation est surjouée, comme une répétition mal maîtrisée d'une pièce de théâtre. Ça sonne faux. Macron est un bon acteur mais ce n'est plus le moment de cette scène dans le casting. Cette fausse hystérie est totalement décalée. Ce n'est pas crédible. Un calculateur.

mardi 4 septembre 2018

CdC 10



Lundi 24 avril, J-13,

Je me sens si fatigué. Les regards des autres m'épuisent avec leur fatalisme désabusé. Il y a 15 ans, les mines étaient sombres, anéanties voire traumatisées. Là, rien du tout. RAS.
Je souffle toutes les 30 secondes. Cette journée n'en finit pas. Le soleil me fait du bien derrière la baie vitrée.Je m'extraie. Pas longtemps. Je me remets à bougonner. Je m'écoute le disque de Philippe Katerine. "Putain, Marine Le Pen, putain!... ".

CdC 9



Dimanche 23 avril, J-14,

Le hobereau sarthois était nu pour de bon. Pas l'once d'un demi pour cent de vote caché. Les sondages ne s'étaient pas trompés et la marge d'erreur n'a pas existé. Son odyssée politique prend fin.
Et le visage de Le Pen est apparu. Pas grand-monde à s'en émouvoir. C'était attendu, c'est arrivé. Sa présence au 2ème tour est actée, digérée. Apparemment, il ne s'est rien passé.

samedi 1 septembre 2018

CdC 8


Dimanche 23 avril, J-14,

La poésie surréaliste de Jean Lassalle. Délicieusement abscons mais la sémantique ouvre grandes les portes musicales des mots. Hugo à Guernesey, Châteaubriant à Jérusalem, de Gaulle un peu partout où on lui a tendu un micro. Le béarnais s'est fait plaisir. Les bureaux de vote sont ouverts. Autrement dit, le temps est venu.

CdC 7






Samedi 22 avril, J-15

Hamon parle depuis Carmaux. Derrière lui, la statue de Jaurès semble retenir des larmes de dépit devant cette éloquence en berne. Discours poussif, monocorde, hésitant même. Aucun souffle, chaque phrase tombe à plat. Quel ennui. Un discours de technocrate sans vocabulaire pointu. Cruel, pas d'envergure, pas au niveau. Encéphalogramme plat.